lundi 12 novembre 2012

Bolivia : épisode 6 : Potosi et ses mines d'argent


Lundi 29 et mardi 30 octobre 2012


Nous arrivons à Potosi, lundi à 4h du matin, la bouche pâteuse, la tête lourde et le ventre acide... Le chauffeur nous autorise à dormir jusqu'à 6h dans le bus, ça nous évite une nuit d'hôtel.
We arrive at Potosi on Monday at 4am, dry mouthed, heavy headed, and with slightly acidic stomachs... The driver allows us to sleep in the bus until 6am, so that we don't have to pay a night in a hotel.

Potosi et le Cerro Rico.

Nous programmons pour l'après midi, la visite des mines d'argent toujours en activité. Nous prenons une agence de guide gérée par d'anciens mineurs. Ils sont polis, avenants, très drôles et passionnés par l´histoire des mines. On est heureux de rencontrer des guides comme cela car ils sont loin d´être tous comme ça.
We plan to go and visit the silver mines in the afternoon, which are still in activity. We chose a tour agency which is the only one run by exminers independently in Potosi. The are polished, interesting, funny and passionate about the history of the mines. We're happy to meet guides like that because there aren't that many which are so good in this country !


Après un orage d'une rare violence : grêle, éclair, pluie forte (on est à 4000m d'altitude), nous partons avec un petit groupe de voyageurs et deux guides. On passe par le marché des mineurs qui est un marché excentré de la ville où les mineurs peuvent acheter du matériel pour travailler : casque, bottes, outils, dynamites, feuille de coca, alcool pur... Ici, c'est le seul endroit en Bolivie, où la dynamite est en vente libre ! On profite de ce marché pour acheter quelques cadeaux pour les mineurs que nous rencontrerons (soda, feuille de coca, dynamite...). C'est une tradition et ça permet quelques minutes d´échange avec les mineurs.
After a storm of rare violence : hail, lightning, strong rain (we're at 4000m altitude), we leave with a small group of voyagers and two guides. We go via the miners market, a little outside town, where the miners buy equipment for work : hard hats, boots, tools, dyamite, coca leaves, 96% proof alcohol... Here is the ony place in in Bolivia where dynamite is sold freely ! We buy some presents for the miners that we'll meet (juice, coca leaves, dynaite...). Its tradition and allows us to exchange a little with the mineurs.



Depuis quelque années, les mines étant moins riches en matériaux précieux, les grandes multinationales et l'état ont arrêté l'exploitation. Maintenant, les 6000 mineurs qui y travaillent, ont créé des coopératives et essaient de vivre de ce travail si particulier et pénible. Chacun gère ses horaires, son matériel, sa mine...
For th last few years, the mines, which are less rich in precious minerals, the big multinationals and the state have stopped the exploitation. Now, the 6000 miners that work there, created cooperatives and try to live off of this work which is so particular and so difficult. Each one choses his hours, his equipment, his mine...


Nous arrivons devant cette montagne qui a fait la richesse de l'Europe et de bien d'autres pays durant les siècles suivant la colonisation espagnole. C'est impressionnant d'avoir devant les yeux ce lieu si particulier. Cette montagne n'est pas immense, elle a une couleur ocre et lorsque l'on s'approche, on voit que sa surface est complètement érodée, transformée , meurtrie par l'activité humaine.
We arrive in front of the mountain that made the wealth of Europe and many other countries in the centuries following Spanish colonisation. Its impressive to see such a particular lace. The mountain isn't huge, its a deep red and as we approach, we see that its surface is completey eroded, transformed, pummeled by human activity.


Nos guides nous proposent de la traverser de part en part. Ça semble impossible et pourtant, l'intérieur est une vraie fourmilière. Avant d'entrer dans les mines, nous passons par l'une des usines qui traitent les roches afin d'en retirer le métal précieux : l'argent. Des milliers de tonnes sont acheminées ici par les mineurs. Elles sont alors broyées et mises au contact de produits chimiques (cyanure,acide...). Ceci a pour effet de désolidariser les particules précieuses de la roche sans valeur. Pour des milliers de tonnes de roches, de milliers d´heures de travail, seuls quelques kilos de métal précieux vont pouvoir être récupérés.
Our guides suggest that we cross from one side of the mountain to another in the mines. It seems impossible, but the inside of the mountain is a real anthill. Before entering the mines, we go via a factory that processes the rock to extract the precious mineral : silver. Thousands of tons are bought here by the miners. Then they are ground and mixed with various powders (cyanide, acid...) to separate the precious minerals from the worthless rock. For thousands of tons of rock, thousands of hours worked, only a few kilos of precious metal will be retrieved.


On chemine à travers de grosses machines bruyantes, sales, entraînées par des courroies déchirées, dans une atmosphère acide et infecte. On a l'impression de marcher dans les rouages de l'enfer, l'envers du décor.
La pollution des sites est énorme mais ce travail permet de faire vivre des milliers de famille...
We pass huge, noisy machines, pulled by broken straps, in an acidic and harmful atosphere. We feel like we're waking therough the cogs of hell, the other side of the decor.
The pollution of the site is huge, but the work allows thousands of families to live...



Nous nous dirigeons ensuite vers une des entrées des mines. On pense entrer en enfer : les structures en bois sont défoncés par le temps, des chariots en fer gisent comme des animaux morts dans les moindres espaces libres, de la boue mélangée à de l´huile colle aux pieds, les rails aux sols sont des pièges pour les chevilles, la poussière pénètre dans le corps sans difficulté tellement que l'on a besoin de prendre de grandes inspirations (l'altitude étant élevée), le bruit des marteaux résonnent dans les longs couloirs sombres... telle est l'ambiance de travail des mineurs actuellement.
Next we head to one of the mine entrances. We are heading into hell : the wood structures are warped with time, iron chariots lie like dead animals in all the avaiable spaces,mud and oil stick to our feet, the rails along the floor are a trap for ankles, the dust works its way into your body so easily that we need to take deep breaths (the altitude being high), the sound of hammers rings through the long, dark corridors... these are the conditions that the miners work in today.

Avi et Wilson, notre super guide, devant la Cerro Rico. Avi and Wilson, our perfect guide in front of the cerro Rico

Nous progressons dans ces boyaux où des millions de personnes ont perdu la vie (des esclaves indiens et noirs). C'est un vrai labyrinthe. Nous croisons des mineurs poussant des chariots d'une tonne. Ils ont dès fois du mal à les arrêter dans les pentes douces. C'est l'une des causes des accidents d'ailleurs. Parce qu'il y a toujours des morts dans les mines : des accidents avec les chariots, des gaz mortels indétectables, et bien sûr des maladies qui rongent petit à petit le corps des mineurs (silicose, cancer...). On apprend plus tard qu'un semaine après le salut des mineurs Chiliens (largement médiatisé en Europe), la même accident se produisit en Bolivie. Sans l'attention internationale et l'aide des machines Américaines, les 10 mineurs Boliviens sont décédés...
We walk through the entrails where millions of people lost their lives (indian and black slaves). We walk through the labyrinth. We pass miners pushing chariots that weigh a ton. Sometimes they struggles to stop on the gentle slopes. Its one of the many causes of accidents. There are always deaths in the mines : chariot accidents, and of course the illnesses that slowly eat away at the miners bodies (silicose, cancer...). We later learn that one week after the Chilean miners are saved, the same accident happens in Bolivia. Without international attention and help from American machines, the 10 Bolivian miners die...


Notre guide, ancien mineur, est totalement investi dans ce qu'il nous raconte et nous fait part de sa joie d´être désormais guide car ici c´est reconnu socialement et sa santé est épargnée. Nous pouvons échanger avec des mineurs qui se reposent quelques minutes. Tout ceux qu'on croise sont défoncées, épuisés par leurs heures de travail dans les mines depuis le matin. Ici point de détecteur de métal ou autre équipement moderne. Les mineurs travaillent encore de la même manière qu'il y a des centaines d’années, leurs conditions de travail sont guère améliorées.
La loi, depuis quelques années interdit le travail pour les moins de 18 ans dans les mines. Mais comme dit Wilson, notre guide, il y a la loi et il y a la réalité. Il n'y a jamais de contrôle de l'état. Et même si les pères de famille, mineurs, savent les risques pour la santé, leur situation de famille les pousse à faire travailler leurs enfants dans cet enfer noir. On rencontre plusieurs ados qui témoignent déjà d'une activité de plusieurs années. Ils paraissent 20 ans de plus...
Our guide, an ex miner, is completely invested in what he tells us and tells us of his joy to be a guide now, because it is socially recognised that his health is spared. We chat a little with miners who are taking a few minutes rest. All the miners we see are wiped out, exhausted from their hours of hard labour in th mines since the morning. The law prohibits the work of under 18s in the mines. But as Wilson, our guide, tells us, there's the law and there's the reality. The state never makes inspections. And even if the father's, miners themselves, know the health risks of this work, their family situation pushes them to make their children work in this black hell. We meet several teenagers who tell us they have already worked several years in the mines. They look 20 years older...




Un filon d'argent. A vein of silver.

Après quelques boyaux verticaux où nous cheminons sur des échelles, nous arrivons dans une cavité où Tio est représenté. Tio, c'est le Dieu des mines, le diable : Il a un visage plutôt indien, grand, musclé et nu. Il tient dans sa main son sexe en érection qui est le symbole de la fertilité. Cette cavité est un lieu de prière  pour les mineurs qui viennent demander protection et richesse. Le rite consiste à verser quelques feuilles de coca et quelques gouttes d'alcool pur sur ses jambes et devant lui, puis de faire des demandes à haute voix. « Tio, ta bouche est la mienne, je bois pour toi cet alcool pur afin que tu mettes sur mon chemin un filon d'argent d'une grande pureté. » Nous buvons alors tous cette boisson extraite de la canne à sucre et qui est vendu par litre dans les marchés. C'est de l'alcool à 96 degré et c'est le quotidien des mineurs !
After several vertical tunnels that we climb on rickety ladders, we arrive at the cavern where Tio is represented. Tio is the miners God, the devil : he has an indian face, is big, muscular, and naked. He holds his giant erection is his hand which is a symbol of fertility. This cave is a place of worship for the miners who come to pray for protection and riches. The ritual consists of plaing a few coca leaves and drops of alcohol on his legs and in front of him, and then make your requests aloud : « Tio, your mouth is mine, I drink this pure alcohol for you, so that you may place a track of silver of immense purity in my way ». We all then drink this alcohol made from sugar cane and which is sold by the litre in the market : this 96% alcohol is part of the daily life of the miners !

Tío, le Dieu des mines.  Pas aussi grand que Jeremy.  Tio, the Mine's God (the Devil).  Not as big as Jeremy.

Les feuilles de coca sont également la substance indispensable pour chaque travailleur, nous les croisons tous avec une boule dans la joue qui leur permet d'endurer leurs souffrances.
Cocoa leaves are also indispensable for each labourer, we see them all with a ball in thier cheek, which allows them to endure their suffering.


Bonnie and Clyde.

Après 3km de marche tantôt courbés, presque à 4 pattes, tantôt debout, nous nous extirpons de ces entrailles par une des sorties, de l'autre côté de la montagne. Nous venons de la traverser de part en part.
After 3km, sometimes bent double, almost on all fours, sometimes upright, we exit the entrails at the other side of the mountain, which we have crossed fro one side to another.


A notre retour dans la ville, le guide nous montre les quelques voitures luxueuses de quelques mineurs qui ont réussi. Il insiste sur le fait que la chance a une part importante dans le métier. Lorsqu'on trouve un filon d'argent, on creuse. Il va peut-être grossir au point de changer notre vie ou sera-t-il le point de départ d'une journée d'effort pour rien, juste pour quelques heures de rêve.
After our return to the town, Wilson points out a few luxurios cars of the few miners that have suceeded. He insists that luck plays a large part in the job. Once you find silver, you dig. If you're lucky, it will grow to change your life forever, or it will just be the starting point a days work for nothing, just a few hours of dream. Here they have no modern metal detectors or other, they work in the same way the miners did hundreds of years ago, their working conditions barely changed.


Il est 7h30 du matin, j'écris depuis 6h. Avi est épuisée et dort tranquillement à côté de moi. Écrire me permet d'inscrire un peu plus dans mon corps et dans ma tête ces sensations, ces odeurs, ces images, cette histoire de l´humanité.
It is 7:30am, and Jeremy has been writing since 6am. I, exhausted, sleep on next to him. Writing helps him to mark his body and his mind with the sensations, smells and images of this incredible story of humanity.


Visiter les mines n'est pas une décision que l'on prend facilement puisqu'il est question de croiser des personnes qui y travaillent, qui en souffrent, voire qui en meurent. Mais je ne regrette pas ce choix car il permet de se mettre dans une situation de vie que des millions de personnes ont connue et connaissent, peut être même mes propres ancêtres dans les mines de charbon des Cévennes ou d'ailleurs? C'est partager, l'espace d'une journée, la souffrance, l'angoisse, la fatigue et l'espoir des mineurs.
Visiting the mines is not an easy decision to make, because we cross the people who work there, who suffer there, and even who die there. But Jeremy doesn't regrest our choice as it allows us to put ourselves in the shoes of thousands, millions of people, maybe even his ancestors who worked in the coal mines of the Cevennes or elsewhere. It means sharing, for just one day, the suffering, the angst, the fatigue and even the hopes of the miners. I feel that until you've seen it for yourself you cannot imagine, or understand.


Aujourd'hui, mardi 30 octobre, nous visitons la casa de la Moneda à Potosi. Ce bâtiment immense a été construit en 1560, après que les espagnols trouvèrent « la montagne d'argent » (Cerro Rico). Ce bâtiment a donc servi à fabriquer les pièces d'argent du royaume d'Espagne. La visite guidée en français nous permet de bien comprendre le rôle central de ce bâtiment au sein du royaume.
Today, the 30th october, we visit the Casa de la Moneda. This huge building was built in 1560, after the Spanish found Cerro Rico, the Rich Mountain. This building was used to make all the silver money of the Spanish Empire. The guided tour in French allows us to understand the central rôle this building once played.

La casa de la Moneda.

Peinture anonyme représentant le Cerro Rico (colinne riche) et le syncrétisme religieux de bolivie! Anonymous painting  representing the Cerro Rico (rich mountain) and the bolivian religious synchretism.


On peut voir l'évolution des procédures des fabrications de la monnaie : aux premières pièces frappées une par une au marteau, aux machines électriques du début du 20eme siècle , en passant par les gigantesques laminoirs du 18eme en chêne vert (très bien conservés grâce au climat froid et sec de Potosi, les seules au monde encore en état de marche). Ces laminoirs étaient actionnés par des mulets, et avaient pour fonction d'aplatir les lingots d'argent (réchauffés préalablement par les fonderies juste à côté) afin d'obtenir des plaques fines d'argent et découpées par la suite en pièce.
We see the eolution of the procedures of stamping out the coins : from the first coins punched with a hammer, up to the electric machines fo the 20th century, passing by the huge silver presses of the 18th century, well preserved thanks to the cold and dry climate of Potosi, the only of their kind still left in the world. These presses were pulled by doneys and flattened out the ingots of silver (heated beforehand in the frnaces next door) to make very fine sheets of silver that were then cut into coins.

Première méthode pour frapper les pièces. First metod for stamping coins.

Un laminoir.  Silver press.
Incredible locking mecanism made of silver.  Mecanism de cerrure incroyable fabriqué entièrement d'argent.

Fonderie.  Furnace
Un laminoir à vapeur.  Steam press.

Un laminoir électrique.  Electric press.
Momies d'enfants. Children mummies.

Un crâne déformé (au temps des incas) : 2 hypothèses. Soit une distinction sociale effectuée sur les bébés des classes aisées, soit une volonté d'atrophier les cerveaux  des enfants des classes sociales les plus faibles pour les rendre plus "maléables".  Deformed incan skull.  2 theories.  1. Social distinction for upper class babies.  2. attempt to ipede the development of the brain of children of the lower classes to make them more "maleable".
Une curieuse frise historique commençant par Adam et Eve.  Curious timeline beginning with Adam and Eve.
Le soir, nous partons pour Sucre passer quelques jours. Nous prenons le bus de la nouvelle gare routière de Potosi. A l'intérieur, les femmes des différents compagnies de bus s'égosillent en criant la destination de leur bus. Au final on se croirait dans la jungle avec des cris de singe : Sucréééééé, Lapalapalapalapaaaaazzzzzzzzzzz, oruroooooooooo...à devenir fou !
That evening we head off for a few days in Sucre. We take the bus from the new bus station in Potosi. Inside, the women from different bus companies shout the destination of their bus. Its enough to beleive we're in the jungle with screeching monkeys Suréééééééé, Lapalapalaplapazzzzzzzzz, Orurururoooooooooo... its enough to drive you mad !


To be continued...
















1 commentaire:

  1. j'ai appris plein de choses interessantes, c'est passionnant ce que vous avez ressenti et tu décris cette visite dans la mine d'une telle façon qu'on y est avec vous! merci mes chéris de nous faire partager vos émotions ! nous sommes fiers de vous !

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